Quand s’ouvre le dernier trimestre et que déjà se préparent les projets de la saison prochaine, faisons un petit détour sur la place des musiques actuelles et de la chanson dans l’éducation artistique et culturelle en milieu scolaire. Ce registre est familier à Zebrock depuis 27 ans, puisque c’est un des axes fondateurs du projet: transmettre des savoirs et nourrir la curiosité et l’appropriation critique des adolescents, notamment en collège.
Objet familier s’il en est, la chanson permet de construire des séquences pédagogiques originales. Tout d’abord c’est une œuvre: comme toute œuvre elle agrège bien plus de choses que ce qu’elle nous présente d’elle, elle est la concrétion d’un travail long nourri d’une expérience antérieure, bâtie à partir de codes dont la connaissance participe de notre acculturation, de notre épanouissement. L’intérêt de la chanson réside dans sa familiarité qui permet de vite dépasser les inhibitions souvent à l’œuvre quand on parle d’objet artistique, notamment dans les quartiers populaires et modestes. Son interprète, son/ses/créateur/s, son époque, son propos, sa couleur musicale offrent autant de pistes de discussion avec des élèves toujours preneurs de partir à l’aventure pour peu que l’on ne s’embarrasse d’aucune condescendance ni a priori.
Dans cette logique les expérimentations conduites par Zebrock se sont toujours révélées fructueuses, permettant de faire passer les élèves du « j’aime (ou pas) » à des étapes de discussion raisonnée que les travaux demandés suscitent, notamment chroniques, parodies, commentaires, interviews et autres sujets rédigés pour un journal de classe sur le net.
Cette logique sur laquelle se sont fondées les actions éducatives que Zebrock s’emploie aujourd’hui à renouveler à l’aune des outils et usages numériques, prend tout son sens inscrite dans la nécessaire lutte contre l’échec scolaire. Car, s’il est toujours plaisant et valorisant pour des adultes de venir parler de leur passion dans des classes (schéma un poil autocentré souvent renouvelé dans le cadre scolaire), ne perdons pas de vue l’essentiel: enrichir les ados de connaissances et de capacité à les discuter. Les pédagogies du détournement – par exemple la scolarisation d’un objet non-scolaire, en l’occurrence la chanson, – si elles ne règlent pas tout, sont cependant un précieux point d’appui pour modifier le regard de l’élève sur l’école et nourrir son appétence scolaire. La participation à des concerts et la rencontre avec des artistes viennent utilement compléter le dispositif qui a de fait besoin d’être inscrit dans la durée.
Au fil de notre travail nous avons vu surgir bien des questions nouvelles, parfois des écueils, par exemple celui des réquisit scolaires: à quel niveau l’école, dans ses programmes place-t-elle les seuils de compréhension et que se passe-t-il avec les élèves qui ne les franchissent pas ou mal, quand bien-même chacun peut mesurer à quel point ils sont savants…mais pas de ce qui est attendu ! Cette longue expérience de Zebrock a permis de bien penser des projets et dispositifs en cours de préparation pour leur relance en 2017/2018.
Faut-il préciser que cela demande des moyens, pas bien élevés, mais suffisants pour bâtir des outils de médiation efficients, ce qui appelle des équipes qualifiées. Les centaines d’étudiant/e/s en médiation, impatients d’en découdre aimeraient sans doute que les problématiques de l’action culturelle et de l’éducation artistique et culturelle soient enfin mises sur la table avec les budgets publics à la mesure de l’enjeu. Nous aussi.